• Octo
    Le grand écrivain et dramaturge algérien, Kateb Yacine, écrivait à propos du massacre du 17 octobre 1961 :

    « Peuple français, tu as tout vu
    Oui, tout vu de tes propres yeux
    Tu as vu notre sang couler
    Tu as vu la police
    Assommer les manifestants
    Et les jeter dans la Seine.
    La Seine rougissante
    N’a pas cessé les jours suivants
    De vomir à la face
    Du peuple de la Commune
    Ces corps martyrisés
    Qui rappelaient aux Parisiens
    Leurs propres révolutions
    Leur propre résistance.
    Peuple français, tu as tout vu,
    Oui, tout vu de tes propres yeux,
    Et maintenant vas-tu parler ?
    Et maintenant vas-tu te taire ? »
       

    Ces mots du poète continuent encore à raisonner dans la tête de ceux qui ont vécu cette tragique nuit d’automne à Paris. À travers ces mots, c’est toute la conscience du peuple français qui est ici interpellée pour mesurer l’ampleur du massacre de ce mardi pluvieux d’octobre 1961. Mais ces mots qui traduisent le drame des Algériens à Paris ce jour-là, n’évoquent pas le pourquoi. Voilà une question que tout le monde se pose d’autant plus que ce massacre intervient à moins de six mois du cessez-le-feu. Il intervient dans un contexte où le peuple français s’est exprimé à plus de 75% en faveur de la politique de de Gaulle, de l’autodétermination de l’Algérie. Et il intervient également dans un moment où les négociations entre l’État français et les Algériens représentés par le Front de libération nationale avaient commencé.

    De ce point de vue, nombreux sont ceux qui soutiennent que le 17 octobre 1961 n’était qu’un massacre de trop, donc gratuit. Néanmoins, cette thèse ne peut être justifiée. Car il existe des textes de l’époque qui expliquent toute la logique ayant conduit au massacre des Algériens. Cette logique remonte à 1958 lorsque Maurice Papon fut nommé préfet de police de Paris. Partisan d’une guerre à mort contre la Fédération de France du FLN et contre l’immigration algérienne, ce dernier, à peine installé, « avait créé tout un dispositif : à sa tête le Service de coordination des affaires algériennes (SCAA), dont dépendait le service d’assistance technique (SAT), commandé par un militaire, le capitaine Raymond Montaner ». Papon et Montaner avaient alors déclenché une opération « anti-Algériens » tout en faisant usage des pires méthodes utilisées en Algérie par les parachutistes. Ainsi, en juillet 1959, ils ont soumis à leur Premier ministre, Michel Debré, un projet intitulé « Destruction de l’Organisation rebelle dans le département de la Seine- une Solution- La Seule ! » Ce projet consiste en quelque sorte à étendre à la région parisienne les moyens employés par les parachutistes lors de la Bataille d’Alger. D’après l’historien français Gilles Manceron, ce plan, « approuvé en haut lieu, avait conduit à la création en décembre 1959 d’une Force de police auxiliaire (FPA) entièrement aux ordres de Montaner, composée d’hommes, souvent d’origine rurale, transplantés d’Algérie, dont certains ne parlaient pas français, dans un Paris qu’ils ne connaissaient pas. Maurice Papon raconte dans ses mémoires : » l’un de ces hommes se perd dans Paris dès sa première sortie. Il téléphone à la caserne. On lui demande de décrire le paysage qui l’entoure pour le remettre sur le bon chemin. Il répond qu’il se trouve à proximité d’un grand pont sous lequel ne coulait aucune rivière : c’était l’Arc de Triomphe ! » C’est dire à quel point ces Algériens étaient à la merci de leur strict encadrement par des militaires. »

    Mais cette organisation parallèle n’avait pas pu venir à bout de la Fédération de France du FLN, mieux organisée et mieux structurée. Au contraire, les fidaïs de la fédération avaient neutralisé plusieurs membres de la FPA. Ils avaient même noyauté cette force de police, à un certain moment. Maurice Papon n’a jamais admis l’échec de sa stratégie. C’est pourquoi, il avait rallié ceux qui étaient contre les négociations avec les Algériens. Donc, la brutalité avec laquelle il avait réprimé les manifestations du 17 octobre s’explique en partie par sa volonté de saborder le processus qui devait conduire à l’indépendance de l’Algérie. En effet, la décision d’instaurer un couvre-feu pour les seuls Algériens est prise le 5 octobre, c’est-à-dire, au lendemain de la visite en France du diplomate suisse Olivier Long qui a transmis à Louis Joxe la proposition de la délégation algérienne de reprendre les négociations, interrompues sur un désaccord relatif au Sahara algérien. Ce diplomate avait d’ailleurs écrit, selon Gilles Manceron, avoir senti « au cours de cet entretien, comme lors du précédent, une certaine réserve due probablement à des divergences de vues, peut-être au sein même du gouvernement français. » Pour lui le couvre-feu et la répression sont des « tentatives de sabotage des négociations en cours. »

    Aujourd’hui, avec l’ouverture de certaines archives concernant cette époque, plusieurs historiens affirment sans ambiguïté aucune que le massacre du 17 octobre 1961 était bien programmé. À ce propos, Gilles Manceron soutient que « la violence de la répression dans la nuit du 17 octobre, et dans les jours qui ont suivi, en effet, ne doit rien au hasard. Elle témoigne d’une préparation. En plus de la mise en place par Maurice Papon, avec le soutien du ministre de l’Intérieur et du Premier ministre, des structures répressives, cette répression résulte d’une forme d’encouragement et d’orchestration de la violence, dans les semaines qui ont précédé et durant la nuit fatidique, auprès de l’ensemble des personnels de la préfecture de police. Le 5 septembre, dans une note adressée au directeur du service de coordination des affaires algériennes et au directeur général de la police municipale, le préfet de police a autorisé explicitement les exécutions sommaires des Algériens interpellés. »

    Donc, Maurice Papon avait bien calculé son coup. Il avait d’abord fait en sorte à ce qu’une atmosphère de peur et de légitimation de meurtre s’installe avant de procéder à la provocation de la communauté algérienne à travers la promulgation du couvre-feu.

    Le couvre-feu

    Le 5 octobre, Maurice Papon a informé l’ensemble des responsables de la police de l’instauration d’un couvre-feu. Tout de suite après, le directeur général de la police municipale, Maurice Legay, a émis une note de service n°149-61, destinée à sa hiérarchie, et dans laquelle il affirme : « J’ai décidé de prononcer le couvre-feu, pour les Français musulmans d’Algérie, de 20h30 à 5h30 du matin. D’autre part, les débits de boisson tenus et fréquentés par les Français musulmans doivent être fermés à partir de 19 heures. Enfin, tout Français musulman circulant en voiture doit être interpellé et, en attendant la décision du commissaire de police ou du service de coordination des affaires algériennes, la voiture sera provisoirement mise en fourrière. »

    Le même jour à 17 heures, Maurice Papon rend public un communiqué, dans lequel, il valide les termes de la note de service du directeur de la police municipale. Le 7 octobre, une circulaire n°43-61 est promulguée par le directeur général de la police municipale de Paris pour expliciter et préciser les modalités d’application des mesures relatives au couvre-feu et à la circulation « des Français musulmans algériens » en voiture.

    A la suite de cette décision de Papon, le comité fédéral de la Fédération de France du FLN a tout de suite pris ses responsabilités. Le 10 octobre 1961, il promulgue à son tour une circulaire signée Kr. (Kaddour, pseudonyme d’Amar Ladlani) où il définit clairement sa riposte. Il préconise un plan d’action en trois phases pour combattre « énergiquement » les mesures de Papon. Le comité fédéral exhorte alors les Algériens à boycotter le couvre-feu en sortant massivement en compagnie de leurs femmes et de leurs enfants le 14 octobre, pour circuler dans les grandes artères de Paris. Le comité fédéral demande également aux commerçants algériens de fermer leurs établissements pendant 24 heures à partir du 15 octobre. Le comité fédéral a tout prévu dans sa circulaire. On peut y lire ainsi une observation où même les slogans qu’il fallait scander étaient énumérés : « Comme il est à prévoir des arrestations ou des internements, il convient de préparer les femmes à une manifestation avec les mots d’ordre suivants :

    « A bas le couvre-feu raciste

    - Libération de nos époux et de nos enfants

    - Négocier avec le GPRA

    Indépendance totale de l’Algérie. »

    Après la circulaire de la Fédération de France, le Mouvement contre le racisme, l’antisémitisme et pour la paix (MRAP) – aujourd’hui, ce sigle désigne le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples – a rendu publique le 12 octobre une déclaration pour dénoncer le couvre-feu imposé aux Algériens de Paris. Le 17 octobre, la Fédération de France fait circuler une note dans laquelle figurent des consignes à suivre lors de la manifestation. Cette note a mis l’accent sur le caractère pacifique du boycottage du couvre-feu raciste.

    Après le massacre

    Le 17 octobre à minuit, la préfecture de police communique le bilan de la répression : deux morts, plusieurs blessés et 7500 Algériens arrêtés. Un bilan qui reste loin de la réalité. Cette tendance à minimiser la répression est maintenue jusqu’à l’éclatement de la vérité au grand jour. En effet, un groupe de policiers républicains avait fait circuler un tract le 31 octobre dans lequel ils témoignent de la brutalité de la répression menée contre les Algériens par leurs collègues. Ils soulignent ainsi que « parmi les milliers d’Algériens emmenés au parc des expositions de la porte de Versailles, des dizaines ont été tués à coups de crosse et de manche de pioche par enfoncement du crâne, éclatement de la rate ou du foie, brisure des membres. Leurs corps furent piétinés sous le regard bienveillant de M. Paris, contrôleur général. D’autres eurent les doigts arrachés par les membres du service d’ordre, policiers et gendarmes mobiles, qui s’étaient cyniquement intitulés « comité d’accueil ». […] À la station de métro Austerlitz, le sang coulait à flots, des lambeaux humains jonchaient les marches des escaliers. Ce massacre bénéficiait du patronage et des encouragements de M. Soreau, contrôleur général du cinquième district. »

    Cette répression fut également condamnée par plusieurs intellectuels et universitaires français, qui ont signé un appel publié par la revue de Jean-Paul Sartre, les Temps Modernes du 18 octobre. Leur appel était destiné à manifester leur solidarité aux travailleurs algériens et à exiger l’abrogation immédiate de mesures indignes. Parmi les signataires de cet appel, figurent Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Claude Simon, Maurice Blanchot, André Breton, Maxime Rodinson, Olivier Todd, Pierre Vidal-Naquet…ils étaient en tout 229 signataires.

    Enfin, l’Histoire retiendra une chose : le 17 octobre 1961, il avait plu des cadavres d’Algériens sur la Seine.

    Algé


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    «Quand les hommes ne peuvent plus changer les choses, ils changent les mots». Jean Jaurès

     

     

    Tout au long de cette histoire de cohabitation qui fut dans l'ensemble douloureuse, il y eut des hommes et des femmes européens d'Algérie qui, à des degrés divers, se sont battus pour la dignité et contre le système colonial, notamment en contribuant à l'indépendance de l'Algérie.

    Sait-on par exemple, qui est Francis Jeanson mort dans l'anonymat le plus strict aussi bien en France qu'en Algérie?

    L'Algérie d'aujourd'hui refuse de voir son histoire en face. Sait-on que des Français se sont battus, se sont exposés et ont mis en jeu leur liberté et parfois leur vie pour l'indépendance du pays tout étant fidèles à une certaine idée de la France?

    Francis Jeanson: l'autre face et l'honneur de la France
    «Mais qu'est-ce que tu connais, toi, de la France, sinon Bugeaud et Bigeard? Tu t'adresses à moi comme si j'étais un traître à mon pays. A partir d'aujourd'hui, je voudrais que tu retiennes que mes camarades et moi n'avons fait que notre devoir, car nous sommes l'autre face de la France. Nous sommes l'honneur de la France.»

    C'est par cette phrase que le philosophe Francis Jeanson- s'adressant au président Abdelaziz Bouteflika -Juin 2000- a défini son rôle lors de l'aide qu'il a apportée à la Révolution algérienne: pour lui, il n'a fait que son devoir et il n'en rougit pas, il se démarque des «autres» qui, au mieux, ont protesté mollement à propos de la torture au pire l'ont approuvée comme l'a fait le cardinal Saliège: «La terreur doit changer de camp.»

    Francis Jeanson «Le porteur de valises» selon le bon mot de Jean-Paul Sartre, durant la Guerre d'Algérie avait fondé le plus important réseau de soutien au FLN en métropole.

    «Depuis 2000, écrit Florence Beaugé, témoignages, articles et procédures judiciaires se succèdent en France, portant sur les pratiques de l'armée durant les «événements» d'Algérie. Des pratiques amnistiées. Mais l'amnistie n'induit pas obligatoirement l'amnésie.(..) Les exactions commencent dès 1830, quand les troupes françaises débarquent à Sidi Ferruch, pour une expédition coloniale longue de quarante ans. Pillages, carnages, incendies de maisons, rafles de civils à grande échelle, etc. La conquête de l'Algérie s'accompagne d'actes de barbarie, les documents d'histoire en attestent. (...)

    Dès 1947 et 1948, André Mandouze et Francis Jeanson s'alarment, dans la revue Esprit, de la situation qui prévaut dans les trois départements français. Mais ils crient dans le désert.

    En 1951, un ancien résistant, le journaliste Claude Bourdet, pose la question «Y-a-t-il une gestapo algérienne?» dans les colonnes de L'Observateur, et décrit les méthodes en vigueur dans les commissariats: électricité, baignoire, pendaison (...)».

    Francis Jeanson explique le sens de son combat: «Ce qui se passait en Algérie au nom de la France était inadmissible. Il fallait être contre. La seule façon d'être contre, c'était d'être aux côtés de ceux qui se battent.

    On m'a souvent dit que c'était de la trahison. Mais, pour moi, il y avait déjà trahison: celle des valeurs de la France.»

    «Avant de s'indigner des atrocités commises en Algérie, il faut se demander pourquoi nous avons fait la guerre au peuple algérien et pourquoi nous avons laissé faire des choses qui n'avaient pas de raison d'être. (...)

    Depuis mai 1945, et les massacres de Sétif, on aurait dû le savoir. La torture n'est pas née de la Guerre d'Algérie en 1954. (...) Prenez les droits de l'homme. Nous prétendons les enseigner, un peu partout (...)

    Comment pouvons-nous demander à ces peuples, soumis à d'incroyables pressions et à des déstabilisations successives, de respecter les droits de l'homme comme nous y prétendons ici.»
    Et Francis Jeanson s'opposera à Camus et à sa thèse que toute révolution débouche sur la négation des libertés.

    Sartre interviendra dans cette célèbre controverse en assénant à Camus qui voulait garder ses mains propres: «Avoir des mains propres, c'est ne pas avoir de mains.» (..)

    Dès 1958, la diffusion des livres La Gangrène et La Question - publiés mais aussitôt interdits parce qu'ils témoignent de la généralisation de la torture - mobilise des centaines de militants.

    André Mandouze
    André Mandouze normalien, spécialiste de saint Augustin, chrétien de gauche, résistant est un autre «juste»

    En 1956, il s'engage totalement aux côtés de la Révolution algérienne. Il connut la prison pour «trahison envers la patrie» et fut une des bêtes noires de l'OAS.

    Après l'Indépendance, il y retourna en tant que directeur de l'enseignement supérieur et y resta cinq ans.

    Parlant de ses démêlés avec le pouvoir colonial, André Mandouze déclare: «En 1956, en novembre et décembre précisément, j'avais été emprisonné à la Santé pour mon combat en faveur de l'Algérie.

    Par ailleurs, il faut savoir qu'à cette époque, j'avais déjà eu affaire à ceux qui, bien plus tard, formèrent l'OAS (...)

    Permettez-moi de rapprocher le livre d'Henri Alleg (La Question, Ndlr) du combat de celui qui, dès janvier 1955 et jusqu'à la fin de la Guerre d'Algérie, ne cessa de protester et de condamner la torture-je veux parler du cardinal Duval.

    Pour moi, dès la parution de La Question, s'est rétabli, en quelque sorte, le rapprochement de «celui qui croyait au ciel» et de «celui qui n'y croyait pas», contre le racisme colonialiste, de la même façon que les uns et les autres s'étaient retrouvés, pendant la Résistance, contre le fascisme hitlérien.».

    Interrogé sur son appréciation de la loi du 23 février 2005, André Mandouze eut cette phrase sans appel: «Il faut abroger.
      Cet article de loi est scandaleux. Il apporte la preuve que le colonialisme est encore bien vivant dans l'esprit d'un certain nombre de gens qui regrettent que ce soit fini. (...)

    Il faut parvenir à un accord de fond pour soigner définitivement les blessures du colonialisme et que naisse entre la France et l'Algérie une véritable amitié. L'Europe, sans l'Afrique et l'Algérie, ce n'est pas l'Europe. Inversement, l'Algérie et le Maghreb, en rapport avec l'Europe, c'est la possibilité de contrer cette Amérique qui se conduit lamentablement en Irak et ailleurs.

    Voilà les vrais enjeux.»

    Germaine Tillion: Justice et vérité
    Peut-on oublier de citer Germaine Tillion pour qui le combat se résume dans ces phrases: «Je pense, de toutes mes forces, que la justice et la vérité comptent plus que n'importe quel intérêt politique.» Fin novembre 1954.

    Dans l'Aurès, les vieux Chaouïa lui racontent comment un militaire maniaque torture de simples suspects.

    Germaine Tillion ignore tout du problème colonial. Etant reçue par Soustelle son ancien collègue ethnologue comme elle, elle bouillonne: «Croyez-moi monsieur le gouverneur, même un Benboulaïd qui a été arrêté est respectable. Je connais bien sa famille. Je l'ai vu tout gosse à Batna. Mostefa est un patriote et non un criminel de droit commun.»

    Un an plus tard, elle crée des centres sociaux en Algérie. En même temps, Germaine Tillion s'élève avec véhémence contre la torture avec l'historien Pierre Vidal-Naquet ou le journaliste Henri Alleg.

    Le 18 juin 1957, elle participe à la commission d'enquête sur la torture dans les prisons de la Guerre d'Algérie.

    Germaine Tillion, conseillère technique au cabinet de Soustelle, verra Parlanges, le général commandant les Aurès et chargé de la pacification et des SAS chères à Soustelle.

    Ecoutons comment elle raconte son entrevue avec lui: «Lorsque je lui ai raconté comment les officiers «maniaques» torturaient des «réputés suspects», j'ai compris la méthode qu'il pratiquait au regard profondément ironique qu'il m'a «accordé». Je me souviens encore de ses mains de garçonnet, sans cesse en mouvement, lorsqu'il parlait avec une évidente satisfaction de toutes les façons possibles d'égorger un homme.»

    Les autres Justes
    «La vie d'un homme, la mienne, compte peu. Ce qui compte, c'est l'Algérie, son avenir.

    Et l'Algérie sera libre demain. Je suis persuadé que l'amitié entre Français et Algériens se ressoudera», a déclaré Fernand Iveton, peu avant d'être guillotiné.

    Avec Fernand Iveton l'Algérien de coeur et de naissance, il faudrait rendre justice à tous ceux qui - sans être des indigènes au sens de la colonisation - et dans l'ombre au péril de leur vie, ont cru à l'indépendance de l'Algérie. La liste est longue.

    Les hommages sont tardifs, parcimonieux et non dénués d'arrière-pensée. Il faut faire apparaître tous les Français dans le cas adverse et les Algériens dans l'autre ce qui n'est pas vrai.

    Il y eut des «Justes» qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes qui furent considérés eux-mêmes comme des traitres.

    L´Algérie d'aujourd´hui refuse de voir son histoire en face; sait-on que des Français se sont battus, se sont exposés et ont mis en jeu leur liberté et parfois leur vie pour l´indépendance du pays tout en étant fidèles à une certaine idée de la France?»      

    La liste est longue de ceux qui ont bravé les interdits, traversé les barrières invisibles des communautés, l'exemple le plus frappant est celui du Docteur Daniel Timsit qui a participé activement à la guerre d'indépendance de l'Algérie du «mauvais côté». Daniel Timsit est né à Alger en 1928 dans une famille modeste de commerçants juifs.

    Descendant d'une longue lignée judéo-berbère, il a grandi dans ce pays où cohabitent juifs, Arabes et pieds-noirs, que le système colonial s'efforce de dresser les uns contre les autres.

    Il s'occupera du laboratoire de fabrication d'explosifs, puis entrera dans la clandestinité en mai 1956.

    Arrêté, il sera détenu jusqu'à sa libération en 1962, date à laquelle il rentre à Alger. Il s'explique longuement sur son identité algérienne, lui qu'on continue en France, à présenter comme un Européen. «Je n'ai jamais été un Européen», se défend-il.

    Il s'est toujours considéré comme Algérien, lui, dont la langue maternelle est l'arabe «derdja».

    La langue et la culture françaises, qu'il ne renie pas, viennent au second plan. L'algérianité ne se définit pas en fonction d'une appartenance ethnique ou religieuse, mais parce qu'il appelle «une communauté d'aspirations et de destin».

    Un hommage mérité sera rendu au couple Claudine et Pierre Chaulet à l'occasion de la parution de leur ouvrage Le choix de l'Algérie, deux voix, une mémoire. Pour rappel, ce sont eux qui ont exfiltré Abane Ramadane en pleine bataille d'Alger.

    Pour Rédha Malek, le couple Chaulet est considéré comme un symbole de la guerre de Libération. «(...)   L'algérianité du couple Chaulet» n'est pas le fruit du hasard mais d'un engagement total et réfléchi.

    M. Rédha Malek a évoqué également Pierre Chaulet le médecin qui avait rejoint les rangs du Front de libération nationale et le rédacteur à El Moudjahid».

    Après l'Indépendance, le couple Chaulet a contribué au développement de l'Algérie, Claudine Chaulet sera professeur de sociologie à l'université et le professeur Pierre Chaulet fut l'un des piliers de l'organisation de la santé.

    A ce titre, je me souviens qu'en tant que directeur du Centre universitaire de Sétif, il nous a été possible d'ouvrir la filière des sciences médicales grâce notamment au professeur Chaulet qui s'est déplacé à Sétif enseigner pendant une dizaine de jours.

    Il ne voulut pas d'une indemnité, considérant qu'il ne faisait là que son devoir. Qu'il en soit encore remercié trente ans après!

    Il n'est pas possible, dans le cadre de cette contribution, de témoigner et de rendre hommage dans le détail des milliers de personnes françaises de souche ou Algériens- Européens, qu'il nous suffise de citer sans être exhaustif, les avocats Jacques Vergès, Gisèle Halimi, Henri Alleg l'ancien directeur d'Alger Républicain qui écrivit un livre témoignage sur la torture: La Question.

    A côté de la ligne officielle de l'Eglise, il nous faut citer, sans être exhaustif, tous les hommes de religion qui, dérogeant à la norme officielle, ont témoigné notamment contre la torture, je veux citer Monseigneur Duval, l'abbé Bérenguer sans oublier l'immense Frantz Fanon qui combattit avec les armes de l'esprit et dont les écrits -cinquante ans après- sont toujours d'actualité.
    En tout cas, l'humanisme sans complaisance de Francis Jeanson, André Mandouze, Mgr Duval, Germaine Tillion, Henri Alleg, Daniel Timsit et tant d'autres resteront pour nous tous une leçon de vie et ne disparaîtront pas. A ce titre aussi, ils méritent notre respect profond et notre recueillement à leur mémoire. Ces Justes ont fait, en leur âme et conscience, leur devoir. Si on devait, objectivement trouver quelque attrait à la présence française en Algérie, nous ne sommes pas ingrats, nous sommes reconnaissants à la France de compter en son sein des hommes de la trempe de ces géants de l'empathie, du juste combat, de la charité chrétienne. A titre individuel, ils ont transcendé les interdits pour venir prêcher inlassablement la paix, la tolérance, le respect de la dignité humaine. Assurément, ces hommes et ces femmes qui ont risqué leur vie, tournant le dos à une vie de confort et de compromission, ils et elles ont largement leur place parmi les «Justes».
    Cinquante ans après, nous ne devons pas aussi, oublier ceux qui ont fait du mal à ce peuple sans défense. Les tortionnaires de l'Algérie seront cités pour que nul n'oublie les Rovigo, Saint-Arnaud, Bugeaud.

    Si l'Algérie érige un monument de la mémoire, les Justes auront toute leur place.

    Nous devons, dans le même mouvement, nous incliner à la mémoire de tous ceux qui ont aidé l'Algérie dans sa détresse séculaire. La présence française, malgré ses aspects sanguinaires et de déni de la dignité, a laissé, par le dévouement de ses instituteurs, de ses médecins et Européens et aussi Français de souche qui ont, à titre individuel, aimé l'Algérie.

    Ne soyons pas ingrats.

    In L'Expression
     


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  • Benjamin Stora a contribué à briser les tabous qui pesaient en France sur l'évocation de la guerre d'Algérie. Il plaide pour une approche dépassionnée de ce conflit, cinquante ans après son terme.
    Historien, homme engagé, Benjamin Stora, 61 ans, est sans doute le meilleur spécialiste de l'histoire contemporaine de l'Algérie, sa terre natale. Scénariste de Guerre d'Algérie, la déchirure, remarquable documentaire réalisé par Gabriel Le Bomin, il revient sur ce que fut la tragédie algérienne, son oubli et son retour dans les mémoires. De part et d'autre de la Méditerranée.

    Benjamin Stora, scénariste de Guerre d'Algérie, la déchirure, remarquable documentaire réalisé par Gabriel Le Bomin, revient sur ce que fut la tragédie algérienne, son oubli et son retour dans les mémoires.

    Aucune manifestation officielle n'est prévue en France pour commémorer la fin de la guerre d'Algérie. Certes, il s'agit d'une défaite, mais ne pouvait-on pas espérer une phrase, un geste, en guise d'apaisement ?

    On est toujours dans la guerre des mémoires, où chaque camp dit : "Ma souffrance est supérieure à la vôtre, mes morts sont plus nombreux." Cinquante ans après la fin de la guerre, il serait temps d'en finir avec cette logique mémorielle communautaire. Je souhaiterais que la France et l'Algérie respectent toutes les victimes : Algériens, harkis, immigrés, pieds-noirs, appelés. Ne serait-ce que par considération pour les morts.  

     

    Vous venez d'écrire le scénario de Guerre d'Algérie, la déchirure. En revisitant cette période, avez-vous eu le sentiment qu'on n'en parle plus de la même façon aujourd'hui ?

    Lorsque j'étais étudiant à Nanterre au début des années 1970, on n'en parlait pas du tout ! La société française avait tourné la page. C'est René Rémond qui m'a suggéré de travailler sur le sujet. Il m'a présenté au grand spécialiste d'alors, l'historien Charles-Robert Ageron. C'est sous sa direction que j'ai rédigé ma thèse sur Messali Hadj (1898-1974), le pionnier du nationalisme algérien. Vous imaginez... Non seulement l'Algérie n'intéressait personne, mais encore moins le nationalisme, à une époque où les sujets à la mode tournaient autour du socialisme, du mouvement ouvrier, de la lutte des classes... D'ailleurs, j'étais son seul étudiant. Je dois beaucoup à Ageron. Il m'a tout appris du métier d'historien : le bon usage des sources, l'esprit critique, la méfiance à l'égard de l'idéologie. Le tiers-mondisme était très bien porté à l'époque et je militais depuis l'âge de 18 ans dans un mouvement trotskiste, que j'ai quitté quelques années après ma soutenance de thèse en 1978.    

    A quelle date commence-t-on à reparler de l'Algérie ?

    On sort du silence - et pour le chercheur, de la solitude... - en octobre 1988, avec les émeutes d'Alger, qui feront près de 500 morts. Une foule de questions sont alors posées. Comment les Algériens en sont-ils arrivés là ? Comment expliquer cette violence ? Y a-t-il un rapport avec la première guerre d'Algérie ? Ces événements engendrent un retour de mémoire. Les journalistes s'y intéressent, puis des chercheurs.

    Dans les années 2000, également, le cinéma et la littérature s'emparent de l'Algérie...

    On assiste en effet à un basculement dans la fiction cinématographique et littéraire. De mémoire, je citerai un certain nombre de ces films sortis dans ces années-là : Mon colonel, de Laurent Herbiet, L'Ennemi intime, de Florent Emilio Siri, La Trahison, de Philippe Faucon, Hors-la-loi, de Rachid Bouchareb, Nuit noire, d'Alain Tasma, sur le 17 octobre 1961, Vivre au paradis, de Bourlem Guerdjou, Sous les pieds des femmes, de Rachida Krim, etc. De jeunes romanciers s'emparent, eux aussi, du sujet : Jérôme Ferrari (Où j'ai laissé mon âme), Laurent Mauvignier (Des hommes), jusqu'au dernier Goncourt, Alexis Jenni (L'Art français de la guerre). Cette profusion par la fiction donne à la guerre d'Algérie une autre dimension.

     

    Avec le recul, pensez-vous que la meilleure formule pour résumer cette période est La Tragédie algérienne, le titre du livre de Raymond Aron, publié en 1957 et qui provoqua l'ire - et les insultes - de la droite ?

    Oui, c'est une tragédie. Le temps passant, je suis de plus en plus frappé par la grande violence de cette guerre. Même si le bilan des victimes est toujours difficile à établir et sujet à polémique, on peut rappeler que de 350 000 à 400 000 civils algériens sont morts, soit 3 % des 9 millions d'habitants algériens : un pourcentage identique à celui des morts de la Grande Guerre de 1914-1918 ; que 1,5 million de paysans algériens ont été déplacés au prix d'un bouleversement total du paysage agricole. On doit y ajouter de 15 000 à 30 000 harkis, 30 000 soldats français, 4 500 pieds-noirs tués et les 800 000 d'entre eux déplacés en métropole...   

     

    Il faut bien avoir à l'esprit qu'en quelques mois un siècle et demi de présence française s'effondre. L'Algérie n'est pas une colonie comme les autres. Il y a une pénétration de la culture française, des habitudes, des comportements qui vont laisser des traces. La France s'en remettra parce que c'est une grande nation industrielle et une puissance européenne. D'autant qu'elle feint de tourner la page. Il suffit d'écouter la chanson de Claude François, Cette année-là, consacrée à 1962. Le texte évoque le rock'n'roll, les Beatles, Marilyn... Tout y est... sauf l'Algérie. Pas un mot. Alors que les gens du Sud - pieds-noirs, harkis, soldats - vivent une tragédie, la France célèbre les années yé-yé. Deux histoires se chevauchent. Dans l'indifférence totale.

     

    Films, livres, préfaces, interviews : vous êtes partout une sorte de "Monsieur histoire d'Algérie". Comment expliquez-vous cette position centrale ? Est-ce seulement la consécration d'un travail ?

    J'ai publié des ouvrages sur l'histoire du Vietnam et du Maroc, pays où j'ai vécu plusieurs années. Mais, en France, c'est toujours de l'Algérie qu'on me parle... Sûrement y a-t-il le résultat de trente-cinq ans de travail, la publication de dizaine d'articles, de livres, de films. J'ai voulu très tôt transmettre mon savoir en produisant des documentaires pour la télévision, ce que, jusqu'à une période récente, peu d'universitaires faisaient. Cette exposition augmente la notoriété, mais aussi l'inimitié et la jalousie... Toutes ces explications ne suffisent pas. Sans doute ai-je creusé un sillon d'où surgissent des questions essentielles pour la société française d'aujourd'hui : l'histoire coloniale et les minorités, les communautés et la République, la religion et l'immigration... J'avancerai une autre hypothèse, plus personnelle. Issu de la communauté juive d'Algérie, peut-être suis-je, par mon origine, à l'intersection de ce qu'on appelait les mondes "indigène"-musulman et "européen"-pied-noir, une sorte de passerelle. Je vous livre tout cela en bloc, ce ne sont que des pistes.

     

    In l'Express

     


    Le jeudi 19 avril 2012 à 18h30  à la Maison du toursime de Grenoble: Benjamin STORA

    Conférence : Les mémoires des blessés de l’Algérie.

    Benjamin Stora en 6 dates

    1950 : Naissance à Constantine (Algérie).
    1978: Doctorat d'histoire sur Messali Hadj, pionnier du nationalisme algérien.
    1986: Maître de conférences à Paris VIII.
    1991: Directeur scientifique à l'Institut Maghreb-Europe (Paris VIII).
    1996: Membre de l'Ecole française d'Extrême-Orient (Hanoi).
    Depuis 2001 Professeur d'histoire du Maghreb à l'Inalco ("Langues O") et à l'université Paris XIII.

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  • Le 18 mars 1962, les délégations française et algérienne parviennent à un accord : le lendemain à midi, le cessez-le-feu entre en vigueur en Algérie.

    La route de la paix en Algérie a été longue. Les conversations secrètes, semi-officielles et ouvertes, se sont multipliées depuis 1956 pour n’aboutir qu’à l’approche du printemps 1962.

    Depuis le mois de septembre 1959 et le discours du général de Gaulle qui annonçait « l’intention de la France de remettre aux Algériens le destin de l’Algérie », le sentiment quasi général était que l’Algérie coloniale avait vécu.

    La majorité des pieds-noirs et une partie de l’armée tenteront de s’y opposer, avec les barricades de janvier 1960 et le putsch raté d’avril 1961. Mais la mécanique de la négociation est engagée.

    La violence de l’Organisation de l’armée secrète (OAS) et celle du FLN étendent la terreur à travers l‘Algérie entière. À Paris, de Gaulle veut se débarrasser du dossier algérien. Aussi, dès le printemps 1961, plusieurs négociations sont menées par les émissaires du Général, qui avait déjà lancé un ballon d’essai lors d’entrevues entre délégations réduites à Melun, en septembre 1960.

    Les négociateurs vont et viennent

    La toute première négociation de 1961 verra même un chef de maquis FLN, Si Salah, rencontrer en catimini le chef de l’État à Paris. En vain. Le chef militaire est isolé et ne représente pas le FLN, dont les dirigeants sont soit emprisonnés, soit réfugiés au Caire ou à Tunis.

    Le premier round véritable de négociation se tient à Evian, en mai-juin 1961. Les deux camps se réuniront ensuite à Lugrin, toujours en Haute-Savoie, au mois d’août suivant. À chaque fois, les délégations dressent un constat d’échec. Les Français mettent en avant le statut de leurs compatriotes d’Algérie et le Sahara qui, à leurs yeux, n’est pas du tout partie intégrante de l’Algérie. Les Algériens veulent l’indépendance et n’entendent pas céder un pouce de leur territoire.

    Alors que les négociateurs vont et viennent grâce aux bons offices de la Suisse, en Algérie l’exode des pieds-noirs a débuté et les civils payent un lourd tribut au terrorisme des deux bords.

    Rendez-vous au « Yéti »

    Pour le seul mois de janvier 1962, l’OAS a fait 200 morts en Algérie.

    Fin 1961, la négociation est relancée, discrètement une fois de plus, mais ces petits pas aboutissent. Le 11 février 1962, Algériens et Français se retrouvent dans le chalet du « Yéti », aux Rousses.

    Ce rendez-vous jurassien sert à déblayer le terrain. Les négociateurs français sont sous pression. De Gaulle leur a dit « démerdez-vous » pour réussir.

    Côté algérien, la situation est plus complexe. Le FLN est profondément divisé entre une partie du gouvernement provisoire de la République algérienne et l’état-major, plus jusqu’au-boutiste. L’axe Ben Bella-Boumediène est en train de se mettre en place. L’Algérie socialiste se dessine sur fond de querelles personnelles. Les résistances françaises, notamment à propos du Sahara, céderont les unes après les autres.

    De Gaulle, pour faire avancer la négociation, avait même agité, sur les conseils de Ben Gourion, le président israélien, la naissance d’un réduit français en Algérie, si aucun accord global n’était trouvé avec le FLN. Au mois de février 1962, l’idée a été totalement abandonnée.

    La France défend les droits des Français d’Algérie à demeurer au sud de la Méditerranée. Le Général insiste pour conserver le plus longtemps possible la base navale de Mers-el-Kébir, près d’Oran, et les polygones de tirs nucléaires du Sahara.

    La conférence préparatoire des Rousses s’achève le 19 février sur un texte quasiment définitif. Les deux délégations repartent pour obtenir l’accord de leurs mandants.

    Le 7 mars, tout le monde se retrouve à Evian. Il faudra onze jours de marchandages supplémentaires pour ficeler les accords franco-algériens. Le 18 au soir, les délégations signent le texte de 84 pages. La guerre d’Algérie est terminée. Mais les drames algériens sont loin de l’être.

    Emission spéciale dimanche 18 mars à 10h 50 sur France3 Alpes et Rhône-Alpes

    Les rédactions de France 3 Alpes et Rhône-Alpes reviennent sur cet événement à l’occasion du 50e anniversaire et vous propose une émission spéciale de 26 minutes tout en images .

    Rappel des faits
    Il y a 50 ans, Evian-les-Bains entrait dans le grand livre de l’Histoire de France et dans celui tout neuf d’une Algérie indépendante. C’est dans l’ancien Hôtel du Parc, que furent signés les accords mettant fin officiellement aux huit années de combat entre le FLN et l’armée française.

    Un Sujet de Sandra Meallier.

     

    Un épisode peu connu
    Les négociations de paix conclues à Evian le 18 mars 1962 ont débuté en fait un an plus tôt, en avril 1961. Pourtant tout a failli capoter d’entrée. En effet, le 31 mars 1961, les partisans de l’Algérie française assassinent le maire d’Evian, Camille Blanc. Un épisode peu connu et qui demeure encore tabou aujourd’hui.

    Explications de Patrice Morel, images Serge Worreth, montage : Eric Achard.


    Sur France 5 le dimanche 18 mars à 22h00.
    "Une histoire algérienne" Documentaire de Ben Salama.

    Cinquante ans, jour pour jour, après la signature des accords d’Evian scellant la fin de la guerre d’Algérie, des témoins et des acteurs du conflit reviennent sur une page de l’histoire qui a profondément marqué la mémoire collective de part et d’autre de la Méditerranée. Un film proposé par Fabrice d’Almeida dans La Case du siècle.


    Un demi-siècle qu’elle a pris fin ! Et pourtant, les cicatrices de la guerre sont encore là, visibles, palpables et toujours douloureuses. Enfants ou jeunes adultes à l’époque, des Français et des Algériens se souviennent aujourd’hui d’une période qui a laissé des marques indélébiles dans leurs mémoires. Chacun à sa manière raconte son histoire d’une indépendance conquise par le sang, pas à pas, huit longues années durant. Une histoire qui est aussi celle de Ben Salama, l’auteur du documentaire proposé dans La Case du siècle.

    De retour dans sa Kabylie natale sur les traces du passé, le réalisateur livre, à la première personne, sa part de vérité, tout en donnant la parole à différentes personnalités issues des deux rives de la Méditerranée. Devenus écrivains, hommes politiques ou politologues, ces anciens militants nationalistes, officiers appelés ou simples civils ballottés dans un conflit dont ils ne comprenaient pas les enjeux rendent compte des années de guerre sans omettre l’horreur des exactions commises par les deux camps. Ben Salama a dédié son film à sa mère qui, au milieu du chaos, a réussi, seule, à subvenir aux besoins de ses cinq enfants. Comme tant d’autres, avant que les accords d’Evian ne viennent enfin instaurer la paix. Une paix qui sera néanmoins synonyme d’exil pour des milliers de Français d’Algérie et de harkis.

    Les principaux intervenants

    Maïssa Bey, écrivaine, fille d’un militant du FLN ; Fatima Besnaci, écrivaine, fille de harki ; Raphaël Dray, politologue, rapatrié d’Algérie ; Jean-Pierre Soisson, ancien ministre, officier appelé (1957-1959) ; Zohra Drif, sénatrice, militante du FLN (1956-1962) ; Rédha Malek, ancien Premier ministre, porte-parole du FLN (1957-1962) ; Michel Rocard, ancien Premier ministre, haut fonctionnaire (1958-1959) ; Pierre Joxe, ancien ministre, officier appelé (1959-1961) ; Gérard Belorgey, préfet honoraire, officier appelé (1956-1957).

     


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