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      Amities 7321
     
    Peindre d'abord une cage
    avec une porte ouverte
    peindre ensuite
    quelque chose de joli
    quelque chose de simple
    quelque chose de beau
    quelque chose d'utile
    pour l'oiseau
    placer ensuite la toile contre un arbre
    dans un jardin
    dans un bois
    ou dans une forêt
    se cacher derrière l'arbre
    sans rien dire
    sans bouger ...
    Parfois l'oiseau arrive vite
    mais il peut aussi bien mettre de longues années
    avant de se décider
    Ne pas se décourager
    attendre
    attendre s'il le faut pendant des années
    la vitesse ou la lenteur de l'arrivée de l'oiseau
    n'ayant aucun rapport
    avec la réussite du tableau
    Quand l'oiseau arrive
    s'il arrive
    observer le plus profond silence
    attendre que l'oiseau entre dans la cage
    et quand il est entré
    fermer doucement la porte avec le pinceau
    puis
    effacer un à un tous les barreaux
    en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau
    Faire ensuite le portrait de l'arbre
    en choisissant la plus belle de ses branches
    pour l'oiseau
    peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
    la poussière du soleil
    et le bruit des bêtes de l'herbe dans la chaleur de l'été
    et puis attendre que l'oiseau se décide à chanter
    Si l'oiseau ne chante pas
    c'est mauvais signe
    signe que le tableau est mauvais
    mais s'il chante c'est bon signe
    signe que vous pouvez signer
    Alors vous arrachez tout doucement
    une des plumes de l'oiseau
    et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.

    Jacques Prévert (1900-1977)


     

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  • Mai

     

    Water Effect 

     

     

     

    Le mai le joli mai en barque sur le Rhin
    Des dames regardaient du haut de la montagne
    Vous êtes si jolies mais la barque s'éloigne
    Qui donc a fait pleurer les saules riverains

    Or des vergers fleuris se figeaient en arrière
    Les pétales tombés des cerisiers de mai
    Sont les ongles de celle que j'ai tant aimée
    Les pétales flétris sont comme ses paupières

    Sur le chemin du bord du fleuve lentement
    Un ours un singe un chien menés par des tziganes
    Suivaient une roulotte traînée par un âne
    Tandis que s'éloignait dans les vignes rhénanes
    Sur un fifre lointain un air de régiment

    Le mai le joli mai a paré les ruines
    De lierre de vigne vierge et de rosiers
    Le vent du Rhin secoue sur le bord les osiers
    Et les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes .


    Water Effec

    Guillaume Apollinaire  ( 1880- 1818)


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  • Amities 6713

    Quand je n’ai rien à faire, et qu’à peine un nuage
    Dans les champs bleus du ciel, flocon de laine, nage,
    J’aime à m’écouter vivre, et, libre de soucis,
    Loin des chemins poudreux, à demeurer assis
    Sur un moelleux tapis de fougère et de mousse,
    Au bord des bois touffus où la chaleur s’émousse.
    Là, pour tuer le temps, j’observe la fourmi
    Qui, pensant au retour de l’hiver ennemi,
    Pour son grenier dérobe un grain d’orge à la gerbe,
    Le puceron qui grimpe et se pende au brin d’herbe,
    La chenille traînant ses anneaux veloutés,
    La limace baveuse aux sillons argentés,
    Et le frais papillon qui de fleurs en fleurs vole.
    Ensuite je regarde, amusement frivole,
    La lumière brisant dans chacun de mes cils,
    Palissade opposée à ses rayons subtils,
    Les sept couleurs du prisme, ou le duvet qui flotte
    En l’air, comme sur l’onde un vaisseau sans pilote ;
    Et lorsque je suis las je me laisse endormir,
    Au murmure de l’eau qu’un caillou fait gémir,
    Ou j’écoute chanter près de moi la fauvette,
    Et là-haut dans l’azur gazouiller l’alouette.


    Théophile Gautier ( 1811- 1872)


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  • Si pour un instant Dieu oubliait que je suis une marionnette en chiffon, et qu’il m’offre un morceau de vie, je profiterais de ce temps le plus possible.

     

    Je suppose que je ne dirais pas tout ce que je pense, mais en définitif je penserais tout ce que je dis.

    Je donnerais une valeur aux choses, pas pour ce qu’elles valent, mais pour ce qu’elles signifient.

     

    Je dormirais peu, je rêverais plus. Je crois que chaque minute passée les yeux fermés représente soixante secondes en moins de lumière.

     

    Je marcherais quand les autres s’arrêtent, je me réveillerais quand les autres dorment.

     

    Si Dieu m’offraient un morceau de vie, je m’habillerais simplement, me déshabillerais sous le soleil, en laissant à nu non seulement mon corps, mais aussi mon âme.

     

    Je prouverais aux hommes combien ils se trompent en pensant qu’on ne tombe plus amoureux en vieillissant, et qu’ils ne savent pas qu’on vieillit lorsqu’on cesse de tomber amoureux.

     

    Je donnerais des ailes à un enfant, mais je le laisserais apprendre à voler seul.

     

    J’enseignerais aux vieux que la mort ne vient pas avec l’âge, mais avec l’oubli.

     

    J’ai appris tant de choses de vous, vous les hommes...

     

    J’ai appris que tout le monde veut vivre au sommet de la montagne, sans savoir que le véritable bonheur réside dans la manière de l’escalader.

     

    J’ai appris que quand un nouveau-né serre fort de son petit poing, pour la première fois, la main de son père, il le retient pour toujours.

     

    J’ai appris qu’un homme n’a le droit d’en regarder un autre de haut que pour l’aider à se lever.

    J’ai appris tant de choses de vous, malheureusement elles ne me serviront plus à grand-chose, car lorsqu’on me rangera dans ce coffre, je serai malheureusement mort.

     

    Dis toujours ce que tu sens, et fais ce que tu penses.

     

    Si je savais que je te vois dormir aujourd’hui pour la dernière fois, je t’embrasserais très fort et je prierais le Seigneur pour pouvoir être le gardien de ton âme.

     

    Si je savais que ce sont les dernières minutes où je te vois, je te dirais « je t’aime », sans présumer bêtement que tu le sais déjà.

     

    Il y a toujours un lendemain et la vie nous donne une autre occasion de faire bien des choses, mais si jamais je me trompe et que je n’ai plus que ce jour, j’aimerais te dire combien je t’aime et que je ne t’oublierai jamais.

     

    Le lendemain n’est garanti à personne, qu’il soit jeune ou vieux.

     

    Aujourd’hui peut être le dernier jour où tu vois ceux que tu aimes.

     

    N’attends pas, fais-le aujourd’hui, car si demain ne vient pas, tu regretteras sûrement de n’avoir pas pris le temps d’un sourire, d’une caresse, d’un baiser, car tu étais trop occupé pour pouvoir faire plaisir.

     

    Garde près de toi ceux que tu aimes, dis-leur à l’oreille combien tu as besoin d’eux, aime-les et traite-les bien, prends le temps de leur dire « je regrette », « pardonne-moi », « s’il te plaît », « merci » et tous les mots d’amour que tu connais.

     

    Personne ne se souviendra de toi pour tes pensées secrètes. Demande au Seigneur la force et la sagesse de les exprimer.

     

    Montre à tes amis et aux êtres chers combien ils sont importants pour toi.

    Gabriel García Márquez

     


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  • Bec 1206

    L'avion ! L'avion ! qu'il monte dans les airs
    Qu'il plane sur les monts, qu'il traverse les mers
    Qu'il aille regarder le soleil comme Icare
    Et que plus loin encore un avion s'égare
    Et trace dans l'éther un éternel sillon
    Mais gardons lui le nom suave d'avion
    Car du magique mot les cinq lettres habiles
    Eurent cette vertu d'ouvrir les ciels mobiles."

                                                                                        Guillaume Apollinaire  (1880-1918) 

     

     


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