Le fait que Kateb Yacine ait choisi d’écrire son récit en français, marque bien la dualité de cette quête. Il n’y avait pas de tradition romanesque en Algérie avant l’arrivée des colons. Le français est donc la langue des histoires écrites. Mais en même temps, ce récit est on ne peut plus algérien : on retrouve dans la structure du roman, la tradition des récits en ellipses, “où chaque détours est un retour”. L’écriture est éclatée comme les sentiments ambigus que l’auteur éprouve pour la langue française : entre fascination et rejet. De ce fait, le lecteur ne peut être passif, et il est difficile de se laisser aller. Pourtant, ce serait une perte terrible que de ne pas faire cet effort de lecture, ce pas vers l’Autre, cette acceptation de repères différents des nôtres, car ce texte est un très beau passage de littérature et de poésie.
Les allusions nombreuses à la condition des colons et des arabes sont introduites discrètement au cours de la narration. Comme dans beaucoup de romans issus de la colonisation, la question de la double identité est permanente. Nedjma, l’étoile, incarne tout à la fois l’être désiré et l’Algérie : elle est une vision fantasmatique de la patrie, elle aussi, voilée par la colonisation (donc les Français) comme la femme l’est par la tradition religieuse musulmane.
Un très beau texte pour découvrir l’Algérie au moment où celle-ci rêvait de prendre son indépendance
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كاتب    ياسين